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Pour une reconnaissance réelle des compétences des manipulateurs d’électroradiologie

Joël COMTE / Séverine MOYNAT

Vice-président CNPMEM – Administrateur AFPPE/ Présidente CNPMEM - Administratrice AFTMN


Il ne se passe pas une semaine sans qu’un article, un édito, une enquête ne relève et souligne le manque criant de professionnels de santé, médicaux et para-médicaux. Fermetures de lits, reports d’opérations, non accès à l’imagerie médicale, les exemples ne sont que trop nombreux et témoignent d’une offre de soin qui se dégrade dans notre pays.

Face à ce constat, il n’est pas rare de voir des prises de positions qui nous disent quelles sont les solutions à apporter pour pallier les difficultés rencontrées par la profession de manipulateur.


D’aucuns affirment que « La spécificité du diplôme français qui inclut les trois secteurs d’activités (diagnostic, radiothérapie et médecine nucléaire) freine la possibilité de recrutement au sein de la communauté Européenne ». Cette analyse est pour le moins approximative. En effet, la pénurie de manipulateurs dépasse nos frontières et a un caractère mondial. Il serait donc vain de croire que la solution viendra de nos voisins européens. De plus, de nombreux pays ont opté pour le même format de formation que le nôtre, avec la polyvalence. Cela se justifie notamment par la multimodalité des téquipements qui évoluent, l’IRM en radiothérapie, le scanner et l’IRM en médecine nucléaire… Également, que penserait un jeune lycéen avec un choix sur parcoursup de formation en tuyau d’orgue sans perspective d’évolution transversale ? Notre métier est déjà peu (mal) connu, n’ajoutons pas des arguments péjoratifs.



Parcoursup est également souvent cité comme la source de tous les maux. Il est bon de se rappeler que le mode de sélection par concours, mis en œuvre dans les IFMEM auparavant, était arrivé au bout d’un système par le manque de candidat. Nous avions parfois presque autant de prétendants que de places disponibles. Ne soyons donc pas nostalgiques de ce passé. Le présent est sans doute perfectible, mais le mode de sélection actuel ne souffre plus du manque de candidats. Il peut donc bien y avoir une sélection qui se met en place. Le taux de réussite de nos étudiants sur les 3 années d’études approche les 80%, ce qui est très au-dessus d’autres formations de types BTS ou DUT[1], sans parler de l’Université. Alors arrêtons de discréditer nos centres de formation, qui, soulignons-le, ont augmenté la capacité d’offre de formation de près de 20% en quelques années. De même, l’opportunité donnée d’accéder en Master via la reconnaissance du grade de licence ne concoure pas outre mesure à une fuite de nos étudiants. De l’ordre de 5 à 10% selon les années et les régions, ce phénomène reste marginal. Par contre, cette possibilité de poursuite est une véritable source d’attractivité pour nos formations et nous met sur un niveau d’égalité face aux autres formations en santé.


Alors, après ces différents points, comment faciliter le fonctionnement des différents services ? La réponse ne sera pas simple, ni unique. Le recours à d’autres professionnels, infirmiers, préparateurs en pharmacie, aides-soignants, est déjà à l’œuvre. Cela peut apporter une réponse sur le court terme, mais ne satisfera pas les manipulateurs dans leur ensemble. Aucun autre professionnel ne possède un champ de compétence aussi élargi et spécifique que le nôtre. Quid des aide-manipulateurs ? Rappelons que ce statut a été mis en voie d’extinction il y a de nombreuses années dans la fonction publique. Il ne correspond non plus en rien au statut d’ACIM (agent des cabinets en imagerie médicale) qui sont des assistants et non des soignants. Si nous devions (re)imaginer des aides manipulateurs, il s’agirait de soignants formés en une année minimum (comme les aides-soignants ou auxiliaires de puériculture). Une orientation spécifique à un environnement où sont mis en œuvre des agents physiques, tels que les rayonnements ionisants ou les champs magnétiques, serait de mise. Nous serions très loin de « (in)formations » en quelque semaines qui ne peuvent en aucun cas apporter les compétences nécessaires et attendues pour prendre en charge des patients de façon sécuritaire.


Une autre voie parfois évoquée, la création de plusieurs niveaux de compétences, avec une formation graduelle en 1, 2, ou 3 années. Pour les mêmes raisons évoquées précédemment, cette hypothèse est non envisageable et constituerait une atteinte grave à l’attractivité de notre profession.


Cette attractivité passe selon nous par la possibilité d’évolution verticale, c’est-à-dire avec l’accès à des formations de type Master. Souvent orientées vers le concept de pratiques avancées (à l’instar des IPA), ces formations pourraient s’envisager également vers des spécialisations. Le champ de l’imagerie interventionnelle est propice à ce type d’évolution et des solutions de spécialisation sont actuellement investiguées. D’autres voies pourraient également être reconnues. L’échographie en fait partie et il est toujours incompréhensible que la voie du Master 2 sur cette modalité ne soit pas ouverte. Les manipulateurs qui travaillent sous protocole de coopération ont largement prouvé, depuis de nombreuses années, que les comptes rendus qu’ils formalisent sont fiables. La plupart des médecins déléguant ne les contrôlent pas. Il est alors étrange, voire absurde, d’entendre des médecins qui rappellent le risque d’exercice illégal de la médecine dans des situations où se sont les médecins eux-mêmes qui sont les organisateurs de ces modus operandi. Aucun manipulateur ne souhaite outrepasser ses prérogatives, par contre beaucoup espèrent pouvoir avoir accès à une formation pour aller plus loin, tout en restant dans le domaine du soin. Cela fait 7 ans[2] que les manipulateurs ne travaillent plus réglementairement « sous la surveillance d’un médecin en capacité d’intervenir immédiatement ». Cela fait plus de 30 ans que les manipulateurs ne travaillent plus effectivement sous la surveillance de médecins en capacité d’intervenir immédiatement… Si tel devait être le cas, il n’y aurait plus beaucoup d’examens d’imagerie ni de traitements réalisés.


Alors reconnaissons objectivement le rôle et les compétences des manipulateurs et regardons ensemble vers un avenir désirable pour tous.



[1] 58,5 ou 63,9, ce sont les pourcentages d’étudiants qui réussissent en 2 ou 3 ans (MESRI, juin 2021) [2] L4351-1 : code de la santé publique ; 2016

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2 comentários


carolcalvier
08 de jul. de 2023

Bonjour

Merci pour ce bilan concernant le métier de manip.Cependant il me semble que vous oubliez une spécialité qui n'a pas de statut mais qui est bien reelle depuis plus de 30 ans.

Je veux parler de la profession de dosimetriste.

Un diplôme existe et nous sommes nombreux à l'avoir obtenu.

Pourtant il n'existe pas de reconnaissance, pas de statut à ce jour.

Comment est-ce possible que les commissions fassent abstraction de ce problème et n'évoquent pas ce métier ?

Merci de votre réponse

C.Calvier

Tu

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severine.moynat
25 de jul. de 2023
Respondendo a

Bonjour,

Vous avez raison, nous n'avons évoqué dans cet article la situation particulière des dosimétristes. Pour autant, un bon nombre des conseillers du CNPMEM ayant participé à l'écriture du référentiel métier il y a une dizaine d'année, je peux vous assurer que votre spécificité est régulièrement discutée avec nos interlocuteurs des pouvoirs publics. Malheureusement, à ce jour, aucune solution ne nous a été proposée, mais nous continuons d'œuvrer activement pour que votre métier, indispensable à la bonne prise en charge des patients puisse être reconnue à sa juste valeur.

S. Moynat

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