Radiologie Interventionnelle : Enjeux et Perspectives pour les Paramédicaux
- Arnaud Legrand
- il y a 12 minutes
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Introduction
À l'heure où la radiologie interventionnelle connaît une expansion significative, avec des procédures de plus en plus mini-invasives et adaptées au modèle ambulatoire, les radiologues structurent leur parcours de formation pour approfondir leur expertise en Radiologie Interventionnelle Appliquée. Cependant, une question demeure : quel est le rôle des auxiliaires médicaux dans cette dynamique ? Qui sont-ils et quels sont leurs besoins spécifiques ?
Méthodologie
En février 2025, le CNPMEM a mené une enquête Flash auprès de la communauté paramédicale, ciblant spécifiquement la radiologie interventionnelle. Cette étude visait à identifier les besoins en formation des professionnels de ce secteur et à recueillir des données factuelles sur l'organisation des équipes sur le terrain, afin d'alimenter les réflexions en cours.
Résultats
1. Profil des répondants
L'enquête a recueilli 327 réponses, dont 309 émanant de manipulateurs en électroradiologie médicale (94%). La répartition par sexe était de 1/3 d'hommes et 2/3 de femmes, avec une représentation de toutes les tranches d'âge. Les répondants exerçaient majoritairement en Centre Hospitalier Universitaire (54%), suivis par les hôpitaux généraux (20%), les établissements privés à but non lucratif (9%) et les centres privés à but lucratif (15%). Un tiers de ces professionnels se consacraient exclusivement à la radiologie interventionnelle, tandis que les autres combinaient cette activité avec d'autres modalités d'imagerie.




2. Spécialités, modalités et innovations technologiques
Parmi les répondants, 50% exerçaient en radiologie pour adultes (hors cardio et neuro), 22% en neuroradiologie, 16% en cardiologie et 5% en pédiatrie. Les procédures étaient principalement réalisées en salle d'angiographie (36%) et sous scanner (30%), bien que l'exercice en bloc opératoire (17%) et en salle hybride (15%) soit également significatif. Dix pour cent des répondants utilisaient des robots, notamment pour des actes de destruction tumorale.


3. Rôle des auxiliaires médicaux
a. Collaboration interprofessionnelle
Conformément au Décret n° 2022-1238 du 16 septembre 2022, les actes de radiologie interventionnelle doivent être réalisés avec l'assistance d'au moins deux auxiliaires médicaux, dont un manipulateur en électroradiologie médicale. L'enquête a révélé que 43% des manipulateurs travaillaient avec des IADE, 24% avec des IDE, 9% avec des IBODE et 19% uniquement avec des manipulateurs. Des aides-soignants faisaient également partie des équipes.
Concernant les praticiens, ils étaient majoritairement radiologues (60%) mais également cardiologues (18%) et chirurgiens (16%)


b. Formation hétérogène
Seuls un tiers des manipulateurs en radiologie interventionnelle avaient suivi une formation complémentaire spécifique, souvent sous forme d’un Diplôme Universitaire. Beaucoup avaient été formés en interne, par compagnonnage. Les besoins identifiés en formation concernaient la maîtrise de l'environnement du bloc interventionnel, la pharmacologie (anesthésie, prise en charge de la douleur, administration des médicaments), l'instrumentation et la gestion du stress.

c. Délégation de tâches
Trente-cinq pour cent des professionnels exerçaient des activités déléguées dans le cadre de protocoles de coopération, et 40% envisageaient d'en mettre en place dans leur service. Des projets émergents concernaient notamment la pratique, de biopsies, d’ablation de cathéters tunnelisés, la pose de désilets et la réalisation de consultations préopératoires.


d. Rôle d'aide opératoire
Comme les IBODE au bloc opératoire, 57% des répondants assumaient le rôle d'aide opératoire, revêtus de tenues stériles, assistant le praticien. Cette proportion atteignait 72% chez ceux exerçant à plein temps en radiologie interventionnelle et 66% chez ceux ayant bénéficié d'une formation complémentaire. L'ancienneté et l'expérience n'influençaient pas cette pratique.

Discussion et Conclusion
Le développement de la radiologie interventionnelle, couplé aux avancées technologiques récentes (IA, robotisation, dispositifs médicaux), souligne la nécessité d'une mise à jour du décret de formation des manipulateurs, qui date de 2012. Bien qu’il comprenne un stage de minimum de 3 semaines et une Unité d’Enseignement dédiée de 40 heures (UE 4.12), une révision pourrait permettre d'établir une formation socle mieux adaptée aux évolutions du secteur.
Par ailleurs, la radiologie interventionnelle constitue un environnement propice aux délégations de tâches. De nombreuses équipes exploitent les simplifications récentes des protocoles de coopération interprofessionnelle pour les mettre en œuvre de manière encadrée et réglementée. Ceci permet notamment une réponse plus rapide et sécurisée aux besoins de la population. Cependant, les compétences des paramédicaux pourraient être élargies pour une meilleure maîtrise de l'environnement du bloc, de nombreux gestes techniques, la prise en charge médicamenteuse et des dispositifs médicaux.
Les professionnels expriment un besoin pressant de se former davantage afin de gagner en autonomie et en expertise. Dans cette optique, la création d'un niveau intermédiaire de formation de niveau Master 2, dédié à ce nouveau métier, semble une piste d'évolution pertinente pour répondre aux besoins de santé croissants. Mais, dans cette perspective, la question qui demeure est : faut-il former des manipulateurs spécialisés ou former à des manipulateurs de pratiques avancées avec une mention en radiologie interventionnelle ?
Séverine MOYNAT Présidente
Joël COMTES Vice-président
Sources
Décret n° 2022-1238 du 16 septembre 2022 relatif aux conditions de fonctionnement des équipements matériels lourds d'imagerie et de l'activité de soins de radiologie interventionnelle
Fiches Unités d’enseignement (UE) – Annexe V ; remplacé par l’annexe de l’arrêté du 9 septembre 2020 relatif au DE ; et l’arrêté du 23 septembre 2020 relatif au DTS
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